Le temps de vivre, au cœur d’une unité de soins palliatifs

L’Amour aura le dernier mot est une invitation à plonger délicatement au cœur du quotidien d’une unité de soins palliatifs de Charente-Maritime. Un documentaire de Présence Protestante et du Jour du Seigneur diffusé dimanche 27 août sur France 2.
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« Oui, j’ai la certitude que rien ne peut nous séparer de son amour : ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni d’autres autorités ou puissances célestes, ni le présent, ni l’avenir, ni les forces d’en haut, ni celles d’en bas, ni aucune chose créée, rien ne pourra jamais nous séparer de l’amour que Dieu nous a manifesté en Jésus-Christ notre Seigneur. » La Bible, Épitre aux Romains, chapitre 8

Voilà un verset bien connu des chrétiens. Il est on ne peut plus clair : celles et ceux qui reconnaissent que l’amour de Dieu est manifesté en Jésus-Christ n’auront rien à craindre quand ils seront confrontés à la mort, aux tribulations ou à diverses forces et puissances terrestres ou célestes.

Aucun ennemi, prédateur, tortionnaire, aucune maladie ni aucune souffrance ne peuvent les séparer de l’amour de Dieu.

Dieu les aime. Point. Pourtant, trois autres petits mots ouvrent aussi le verset et lui donnent une saveur vraiment étonnante : « Ni la vie ? »

On comprend que l’auteur de l’épître veuille rassurer sur le pouvoir limité de la mort et de ses cavaliers. Mais pourquoi les chrétiens devraient-ils craindre que la vie ne les sépare de l’amour de Dieu ? Et pourquoi Paul écrit-il « Ni la vie, ni la mort » en associant ainsi les deux ? Bien des interprétations sont possibles.

En voici une. L’entrée dans la vie, la naissance, et le départ pour la mort ont ces deux choses en commun : nous y entrons seuls et nus et personne n’échappe à l’une ou l’autre. C’est presque une lapalissade. Or, il en est, de même, de façon différente, certes, de toute notre vie : qui connait notre for intérieur ? Qui pourrait dire nos pensées ? Sonder notre âme ?

Tout au long de notre vie une part de nous reste seule. Nos réflexions nous dévoilent. Nous sommes des îles que des ferrys plus ou moins bondés (ou vides) relient. Dimanche soir dernier, j’étais sur la route, seul dans une petite voiture.

À la radio, une animatrice bienveillante donnait la parole à qui voulait. Libre antenne façon « Allo Macha » (le plus vieux se souviendront). Un auditeur des Vosges appelle. Pas de famille, pas d’ami, pas de travail. Surtout : pas l’envie, pas le goût. Ni aujourd’hui, ni hier. Il témoignait de sa très grande solitude. L’animatrice tentait de lui donner des pistes pour qu’il se sorte déjà lui-même (qui d’autre ?) de son immense détresse. Efforts vains. Au volant de ma Yaris, j’avais envie de lui crier :

« Tu es aimé de Dieu : « Ni la vie… »  »

Dans sa profonde solitude, cet homme ne voyait pas ou n’avait pas le courage de saisir les solutions, pourtant accessibles, qui s’offraient à lui. Je crois que souvent, nous sommes comme cet homme : nous sommes ignorants de notre propre condition. Aveugles, nous ne voyons pas les issues. Pourtant, Dieu veille sur nous, au-delà de ce nous percevons. Qui connais le nombre de cheveux qu’il a sur sa propre tête, si ce n’est Dieu ?

Finalement, j’ai réalisé que cet homme n’était pas loin de celles et ceux qui sont déconnectés de la vie en raison de la dégradation mentale, psychiatrique ou physique de leur état de conscience. Alors, je me suis à nouveau posé cette question qui revient souvent : au seuil de la mort, comment Dieu accueille-t-il celles et ceux qui meurent après un long coma ? Ou les fous ? Ou les malades d’Alzheimer ? Etc.

Celles et ceux dont la conscience est altérée ? La personne âgée qui perd la tête est-elle reçue par son père céleste avec le souvenir de sa vie antérieure ou bien dans l’état de conscience où elle se trouve au moment de sa mort ?

Heureusement, j’ignore la réponse. Je veux laisser Dieu être Dieu, et lui faire confiance. Je ne sais combien de cheveux j’ai sûr la tête et je ne connais même pas avec clarté tous les méandres de ma propre âme.

Alors quelle maîtrise pourrais-je prétendre avoir sur le fil de ma vie ? Je dois jouer mon rôle, prendre des décisions, avoir des initiatives. Mais comment serais-je capable de déterminer avec sagesse le jour, l’heure de ma propre mort ? Je crois qu’en la matière, aucun dogme, aucune loi n’aura le dernier mot. Je crois que pour ma vie, l’amour aura toujours le dernier mot. Et je sais d’où il vient.

Christophe Zimmerlin, Présence Protestante

L’Amour aura le dernier mot

Un documentaire réalisé par Grégoire Gosset sur une idée d’André Breuvart produit par Aligal production, france.tv studio, le CFRT et La Fédération protestante de France
Infochretienne.com