L’Irak a lancé une chaîne de télévision pour sauver le syriaque, une langue des chrétiens du pays

En Irak, l’arabe et le kurde sont les langues officielles, mais dans la vie de tous les jours les membres des vieilles communautés chrétiennes parlent encore le syriaque entre eux. Ce dialecte ancestral est de moins en moins usité, et le gouvernement irakien a créé une chaîne de télévision afin de le protéger et, indirectement, encourager les chrétiens à rester.
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L’Irak comptait 1,5 million de chrétiens avant la chute de Saddam Hussein, on estime qu’il en reste 400 000 vingt ans après. La plupart d’entre eux parlent le syriaque, un dialecte araméen déjà utilisé par plusieurs des premières communautés chrétiennes du Proche-Orient et qui est présente dans la liturgie dite de saint Jacques le Mineur, du nom du premier évêque de Jérusalem. La conquête arabe, au VIIème siècle a conduit à l’amenuisement de l’importance du syriaque.

Avec la chaîne Al-Syriania, lancée en avril par les autorités, ce dialecte retrouve une certaine visibilité compensant quelque peu la déperdition de centaines de milliers de chrétiens. Mariam Albert, présentatrice des informations sur cette chaîne déplore l’effacement du syriaque :

« C’est vrai que nous parlons syriaque à la maison, mais malheureusement j’ai l’impression que notre langue est en train de disparaître lentement mais sûrement. Il est important d’avoir une chaîne de télévision qui nous représente. »

Le directeur de la nouvelle chaîne, Jack Anwia, y voit une prise de conscience des autorités nationales de l’importance du spectre culturel dont la langue des chrétiens est un élément important :

« Autrefois, le syriaque était une langue répandue dans tout le Moyen-Orient. [Bagdad doit] l’empêcher de disparaître. La beauté de l’Irak est sa diversité culturelle et religieuse. »

Sauver le syriaque par le divertissement

Al-Syriana compte une quarantaine d’employés et propose une offre variée allant du cinéma à l’art et l’histoire. Cependant, si de nombreux programmes sont présentés dans la forme dialectale du syriaque, les bulletins d’information ne le sont qu’en syriaque classique qui n’est pas accessible à tout le monde, déclare Mariam Albert. Mais l’objectif principal de la chaîne est d’utiliser le “divertissement” pour “préserver la langue syriaque”, explique Jack Anwia.

Il y avait urgence, car cette langue vernaculaire pourrait s’éteindre, alerte Kawthar Askar, responsable du département de syriaque à l’université Salahaddin à Erbil au Kurdistan irakien :

« La langue syriaque a été mise à l’écart. On ne peut parler de langue morte, [mais] elle est menacée de disparition. »

Le dialecte est enseigné dans 265 écoles irakiennes, selon Imad Salem Jajjo, responsable du programme d’instruction syriaque au sein du ministère de l’Éducation.

Environ 1 700 manuscrits et 1 400 livres en syriaque, dont certains datent du XIème siècle, sont conservés au Centre numérique des manuscrits orientaux d’Erbil, soutenu par l’UNESCO, l’Agence des États-Unis pour le développement international et les dominicains.

Infochretienne.com